Nous avons parlé dans cet article de certains outils no-code propriétaires que nous utilisons dans notre formation “le no-code pour les développeurs”. Dans le cadre des pratiques no-code, lorsqu’il s’agit de choisir entre des outils no-code open source et des outils propriétaires, de nombreux développeurs peuvent trouver qu’il est plus facile de travailler avec les outils propriétaires (du fait de l’ergonomie ou du support client, par exemple).
Nous essayerons ici de comprendre pourquoi les outils no-code propriétaires sont plus adaptés en phase d’apprentissage mais il nous semble pertinent d’utiliser des outils no-code open source si vous souhaitez aller plus loin et maîtriser vos données (et vos coûts)💰.
Avant de se jeter à l’eau, quelques notions sur le no-code
Le no-code n’est pas un phénomène nouveau et le concept existe depuis longtemps. Sans remonter au Flow-matic conçu en 1955 par Grace Hopper qui comprenait que les analystes avaient des difficultés à manipuler les concepts mathématiques dans le cadre de leur programmation, ou aux premiers ateliers de génie logiciel, comme on disait à l’époque (AGL ou CASE en anglais pour Computer-Aided Software Engineering), c’est en 2001 que Salesforce a créé, humblement, force.com (inactif aujourd’hui), une plateforme permettant aux utilisateurs de développer des applications sans coder directement sur le cloud.
En 2003, WordPress, outil emblématique d’internet, a donné le coup d’envoi à la possibilité de créer des sites web sans code – ou presque. Aujourd’hui encore, environ 35 % des sites web dans le monde sont créés sous WordPress. Puis, un an plus tard, Shopify a débarqué avec sa solution clé main pour la vente en ligne. En 2006, la création de Wix a apporté une souplesse supplémentaire permettant à un plus large public encore de créer des sites web.
Dans un registre connexe, on s’est enthousiasmé dès le début des années 2010 avec la création de IFTTT (If this then that) en 2010 et de Zapier en 2011 qui ont été parmi les premiers services à connecter visuellement des applications tierces par des API. Si la météo est mauvaise, alors on envoie une notification pour dire de prendre son parapluie ☔… En connectant simplement les différents services, les possibilités devenaient vertigineuses.
Ce mouvement a amorcé l’expansion sans précédent de l’industrie du SaaS (Software as a Service) et les entreprises qui créent des plugins et des applications sont florissantes.
Même les développeurs s’appuient sur des outils no-code qui remplacent ou réduisent la charge d’écriture de code personnalisé pour implémenter des fonctionnalités standard telles que l’authentification des utilisateurs, la recherche et les paiements.
Open source et no-code : pourquoi les outils propriétaires semblent plus adaptés ?
Si les logiciels no-code open source présentent de nombreux avantages, naviguer efficacement dans l’écosystème nécessite une forme d’expertise qui n’est pas donné au débutant, par construction.
Puis, contrairement à la plupart des plateformes open source, les solutions no-code propriétaires sont conçues dans un but lucratif. Cela incite à des mises à jour fréquentes et à des mises à niveau de fonctionnalités pour suivre les normes de l’industrie, garantir la satisfaction des clients et rivaliser efficacement avec les autres solutions no-code. Ils peuvent également déployer des programmes d’affiliation attractifs, bénéficiant ainsi plus facilement du soutien des influenceurs.
Enfin, en phase d’apprentissage, les développeurs vont s’appuyer sur l’écosystème des outils propriétaires et acquérir plus rapidement de bons réflexes dans leur pratique no-code – les interfaces étant plus souvent davantage orientées utilisateur.
Support et documentation
Les outils propriétaires ont le plus souvent un support client dédié et une documentation détaillée, ce qui va simplifier le processus de résolution des problèmes et d’apprentissage. En revanche, les projets open source peuvent parfois manquer de support officiel et la documentation peut être moins exhaustive, ce qui peut rendre difficile pour les utilisateurs de trouver des réponses à leurs questions. Toutefois, si vous êtes un développeur confirmé, vous avez l’habitude d’évoluer dans la documentation et vous savez très bien que ce n’est pas avec un abonnement à 30 euros par mois que vous allez bénéficier d’un support premium et que ça va déboguer votre automatisation…
Interface utilisateur intuitive
Les outils propriétaires sont généralement conçus avec une interface utilisateur intuitive et conviviale, ce qui permet aux utilisateurs de commencer à travailler rapidement sans avoir besoin de compétences techniques avancées. En revanche, certains outils open source peuvent avoir une courbe d’apprentissage plus raide, en raison de leur interface utilisateur moins lisse ou de leur configuration plus complexe.
Mises à jour et fonctionnalités
Les outils propriétaires sont souvent régulièrement mis à jour avec de nouvelles fonctionnalités et améliorations, ce qui garantit que les utilisateurs ont accès aux dernières technologies et aux meilleures pratiques. En revanche, les projets open source peuvent parfois manquer de ressources pour maintenir un rythme de développement soutenu, ce qui peut entraîner des retards dans les mises à jour et l’ajout de nouvelles fonctionnalités – mais comme le code est ouvert libre à vous de développer les fonctionnalités qui vous manquent si vous en avez le talent – et de reverser vos contributions à la communauté (c’est ainsi qu’il y a des connecteurs qui sortent sur n8n avant d’être disponibles sous Make – voir plus bas).
Les outils no-code n’échappent pas au débat classique des forces et des limites de l’open source. Les solutions sont nombreuses mais les projets open source ne survivent que s’il y a une communauté forte d’utilisateurs et de développeurs.
Quelles sont les alternatives no-code open source ?
Un logiciel open source (OSS) est un logiciel dont le code source est accessible au public. Cela signifie que n’importe qui peut visualiser, modifier et distribuer le logiciel. Le modèle open source favorise la collaboration, la transparence et le développement communautaire. Tout ceci vous est familier, si vous vous intéressez à l’open source.
Le no-code open source constitue une approche intéressante qui combine l’accessibilité des plateformes no-code à la transparence et la collaboration de l’open source.
Voici quelques outils no-code open source que nous recommandons comme alternatives à Airtable, Make, Softr ou GSheet :
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Baserow est un outil de gestion de base de données no-code open source qui permet aux utilisateurs de créer des bases de données personnalisées avec une interface utilisateur similaire à celle d’Airtable. Il supporte les relations entre les données et offre une API pour les intégrations.
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NocoDB transforme n’importe quel serveur de base de données SQL en une feuille de calcul similaire à Airtable. NocoDB est flexible et peut être auto-hébergé, offrant ainsi une grande personnalisation et contrôle des données.
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n8n.io est la principale alternative open source à Make et propose l’automatisation de workflows avec une approche visuelle pour connecter diverses applications. Il peut être utilisé en mode hébergé, sur un mode SaaS ou sur votre propre serveur. La communauté est dynamique et ajoute régulièrement des connecteurs (dont certains n’existent pas nécessairement sur Make). On l’utilise chez O’clock.
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Huginn constitue également une alternative à Make, il s’agit d’un système permettant de construire des agents qui effectuent des tâches automatisées en ligne. Les agents peuvent lire le web, surveiller des événements et prendre des actions. Il est un peu plus technique à configurer mais offre une grande flexibilité. Pour l’instant, nous n’avons fait que quelques essais sans l’utiliser de façon récurrente.
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Budibase est une plateforme de développement rapide d’applications qui permet de créer des applications web et internes. Elle supporte la création de bases de données, l’automatisation des workflows, et l’authentification des utilisateurs. Budibase est orientée vers les entreprises cherchant à développer des solutions internes et c’est une bonne alternative à Softr, ils revendiquent 100.000 utilisateurs.
- AppGyver n’est pas entièrement open source, il offre cependant une plateforme no-code pour la création d’applications robustes avec une version gratuite pour les développeurs. Il propose des fonctionnalités avancées pour la création d’applications mobiles et web sans coder. Ils ont été rachetés par SAP en février 2021.
Grist est la principale alternative open source à Google spreadsheet.
L’Agence Nationale de la cohésion des territoires met la plateforme en avant notamment pour manipuler les données en open data.
Si vous cherchez d’autres alternatives en français, Jrd10 avait posté, en 2021, un message assez complet sur Framacolibri – sa portée est plus large que le présent article. Ne pas citer Convertigo dans un article consacré au no-code open source serait une faute de goût, mais la plateforme mérite un article complet (« note pour plus tard »).
Travailler avec des outils no-code open source offre de nombreux avantages, mais il sera souvent plus facile pour les débutants de travailler avec des outils propriétaires en raison de leur support, de leur interface utilisateur intuitive et de leurs mises à jour régulières.
Cependant, chaque type d’outil no-code a ses propres forces et faiblesses, et le choix entre les deux dépendra des besoins spécifiques de chaque projet et des préférences individuelles des développeurs.
Le gros point fort d’un écosystème open source pour vos travaux no-code est la maîtrise de vos données et de vos coûts si vous décidez d’installer l’ensemble des applications dont vous avez besoin sur vos propres serveurs. En effet, le système de tarification de la plupart des outils propriétaires se compose d’un abonnement et d’une facturation à l’usage, voire à la transaction. Si vous décidez d’utiliser une solution comme Zapier ou Make comme épine dorsale de votre système d’information, et que les volumes de transaction sont conséquents, votre facture sera à la hauteur. Certes avec n8n, vous allez devoir paramétrer votre serveur dans un premier temps, mais vous maîtriserez vos coûts.
Soulignons enfin la super initiative de Julien Jacquemet, OpenMVPBox qui, comme son nom le laisse entendre, permet de disposer de l’ensemble des outils open source pour concevoir un MVP (Minimum Viable Product). Elle permet d’avoir accès aux principales applications citées dans cet article (et d’autres) en mode SaaS, ce qui permet à Julien d’absorber ses coûts, mais permet à tout un chacun de monter son propre serveur (via le répertoire GitHub du projet). Julien est aussi l’auteur d’une formation en français sur n8n sur Udemy.
Si vous voulez approfondir le sujet, on vous ajoute deux ressources complémentaires (suggérées dans l’excellente newsletter de Contournement du 11 avril 2024 (oui, j’ai dû modifier cet article ;-)) et une dernière couvrant également un angle sociétale suggérée par la Mednum :
- le podcast Projets Libres de Walid Nouh, dans son épisode du 17 mars 2024 (1h20) avec Céline Delval, Arthur Rouzoul et Alexis Kovalenvo ;
- la vidéo très didactique et vivante ci-après (du 13 mars 2024, de 1h17) avec Erwan Kezzar, qui joue à domicile, Walid Nouh et Jan Büscher, le directeur général adjoint de la Mednum ;
- et « Comment se saisir des outils libres no-code pour réussir sa transformation numérique » capté à Numérique en commun[s], qui nous avait sympathiquement cité ici.
Pour terminer, si vous envisagez d’intégrer des pratiques no-code dans votre développement, mais que vous ne savez pas par où commencer, notre formation no-code pour les développeurs est faite pour vous.