C’est fort.
Qui es-tu ?
Je m’appelle Jinane, j’ai 26 ans et déjà des cheveux blancs. À la base, j’ai un master en sociologie, spécialisée dans les statistiques. Puis finalement, j’ai un peu tout plaqué pour devenir développeuse web.
Tu as tout plaqué après ton Master ? Comment ça s’est passé ?
Il fallait que je fasse un stage de fin d’études dans le cadre de mon Master. J’ai un peu galéré à le trouver mais finalement, j’ai été prise chez ShareWizMe, un éditeur de logiciel qui développe des outils pour analyser des questions ouvertes.
J’ai été recrutée comme chargée d’études qualitative et quantitative et je travaillais sur un outil qui triait les questions par groupe de mots. Mon rôle était de spécifier ces mots et les regrouper par thème. En partant de là, on pouvait déduire la thématique du message, si c’était teinté d’optimisme, d’inquiétudes etc.
Par la suite, j’ai testé une application qui était en cours de développement dans la boîte. Et en testant, je me suis prise au jeu et je me demandais comment les devs s’y étaient pris pour créer l’app. De mon côté, j’utilise le logiciel SAS pour les statistiques et je considérais ça comme « un peu du code ». Mais en fait : «pas vraiment».
De fil en aiguille, j’ai sympathisé avec l’équipe de dev, et je posais 1 000 questions par rapport aux fonctionnalités, au code, aux problématiques de réseaux.
Tu commençais à être contaminée…
Ouais ! Et voyant que je m’y intéressais, l’équipe de dev m’a incité à coder via des petites applications. J’ai démarré avec Python, j’ai enchaîné les exos etc.
En fait, le gros souci, c’est que ShareWizMe battait un peu de l’aile et une partie de l’équipe a quitté la boîte et avec : les développeurs. J’ai continué mon stage et comme nous étions dans un coworking, j’ai sympathisé avec une startup qui travaillait sur une application. D’ailleurs, j’ai même fini mon stage avec eux !
Bref, à la fin du stage, je devais présenter mon mémoire. Mais je me suis rendue compte que ce qui m’avait intéressée, c’était le projet web et absolument pas la sociologie. Le boulot, la technique, l’ambiance dans une équipe de dev : j’aimais tout !
Et quelle a été ta première expérience dans le dev ?
Après ma soutenance, je me suis mise à postuler en tant que cheffe de projet web. Et contre toute attente, j’ai été recrutée en CDD chez RezoSocial.
« Contre toute attente » car je n’avais aucune expérience ni même grosses connaissances. L’entretien s’est déroulé très simplement :
– « Tu connais PHP ? »
– « Euh…non. »
– « Tu connais SQL ? »
– « Non plus. »
– « Tu connais un peu Linux ? »
– « Pas vraiment. »
Donc en clair, j’ai dit « non » à tout et comme j’en étais bien consciente, j’ai passé mon entretien à montrer ma motivation et mon envie d’apprendre. Et ça a marché. Je leur ai d’ailleurs demandé s’ils étaient sûrs de vouloir me recruter. Apparemment oui. Ils avaient confiance en ma capacité à apprendre vite ! J’étais folle de joie.
Mais en tant que cheffe de projet, tu codais ?
Je codais un petit peu. Il y avait des devs, évidemment mais j’étais amenée à débugger en SQL, à reconnaître du PHP, écrire des scripts etc. Je ne savais pas « coder » mais je savais faire des petits trucs. Pour moi, c’était déjà énorme ! Et ça m’aidait pour mon métier de cheffe de projet.
Du coup, pourquoi t’es pas restée ?
En fait, la boîte commençait à recruter d’autres dev vu que la santé était bonne (j’imagine). Du coup, il n’y avait plus besoin que les cheffes de projets codent. Ils devaient se contenter de la gestion de projet. Et ça, ça me plaisait pas du tout. Je voulais coder. Du coup, quand ils m’ont fait la proposition de CDI, je l’ai déclinée et je suis partie, dans l’optique de devenir développeuse web.
Le développement web m’a réveillée.
Tu prends beaucoup de risques : tu as plaqué tes études de sociologie alors que t’avais fait le plus dur, et tu plaques ce job alors que l’on t’offre un CDI que tu n’aurais jamais pensé obtenir à la base…
C’est vrai. Mais je voulais pas refaire la même erreur qu’avec mon Master. Quand j’ai eu le Bac, je ne savais pas trop quoi faire et j’ai pris sociologie parce qu’il fallait bien prendre quelque chose. Et encore, c’est surtout les statistiques qui me plaisaient. En fait, je faisais de la sociologie par intérêt, mais pas par passion. Et par moment, je m’ennuyais.
J’ai eu la même peur pour le métier de cheffe de projet. Je me suis demandée si j’allais pas m’ennuyer au bout d’un certain temps. Et là, au lieu d’attendre 5 ans, je suis partie rapidement. Le développement web m’a réveillée.
Bon, et là t’étais décidée à devenir développeuse web ?
Oui ! J’ai quand même cherché un poste ailleurs, en CDD pour subvenir à mes besoins sans être trop engagée. Et le soir, après le boulot, je me formais au CNAM. J’ai travaillé en SSII (que je n’ai pas aimé du tout) puis dans une boite en tant que Data Analyst (grâce à mes connaissances en SQL, SAS).
Les recruteurs étaient très sympas. Ils savaient que je me formais à côté pour devenir développeuse web et ils ont même apprécié ce petit côté débrouillarde et déterminée. Entre temps, je prenais du galon car mon mentor dans la boite s’en allait, et je devais maintenant prendre sa place. C’était énormément de boulot et de stress.
Et à quel moment as-tu connu l’école O’clock ?
Au bout de quelques semaines, un ami que j’avais rencontré pendant mon premier stage m’a parlé de l’école O’clock pensant que ça allait me plaire. J’étais intriguée mais assez méfiante. Le concept avait l’air sympa mais il me fallait beaucoup plus de renseignements pour prendre ma décision. Le site ne me suffisait pas, il me fallait voir le programme en détail, le type d’exercices, bref : je devais connaître les coulisses. On m’a fait une démo sur Discord, on m’a montré l’univers et la salle de classe virtuelle : j’ai adoré. C’était parti : je devais faire cette école !
Comment se sont déroulées tes recherches pour ton emploi en alternance ?
Au début ça se passait pas bien du tout. Personne ne voulait de moi. J’avais un CV trop généraliste. J’ai demandé à mon ami de me conseiller. Et mon ami a confirmé avec tact et gentillesse :
« Non mais même moi, je t’embauche pas avec ce CV ! »
Mon CV était trop bordélique, j’avais tout mis dedans, sans axer sur le côté technique de mes compétences. Du coup, j’ai refait un travail sur le CV et là, j’ai commencé à décrocher des entretiens. Bizarre hein ?
En même temps, je me suis vraiment donnée à fond. J’écumais tous les sites d’emplois, je passais 4 ou 5 heures par weekend à postuler. Je m’étais fait un petit tableau de suivi d’envoi de candidature, de relances etc. J’étais vraiment déterminée et organisée.
Au final, j’ai commencé à chercher mi-avril. J’avais des premiers entretiens début mai et je trouvais mon contrat pro en juillet, avec GBH.
Petite question comme ça : tu es la seule fille chez GBH.
Quasiment oui. D’ailleurs, les recruteurs étaient soulagés de recruter « enfin une fille ». Je pense sincèrement que le fait que je sois une fille a été un atout. Je sens une vraie volonté des entreprises à recruter des développeuses.
C’est pas grave de ne pas tout savoir, tant que l’on fait ce qu’il faut pour progresser.
Et du coup, comment se passe la formation ?
En toute honnêteté, les débuts… c’était compliqué. J’ai même failli abandonner. Pendant les deux premières semaines, il s’agissait d’évaluer notre niveau. Une sorte de bilan de connaissances avant d’attaquer les cours. Autant en PHP je me débrouillais pas mal, autant en JS, ça n’allait pas du tout, je n’y arrivais pas. Pour moi c’était trop dur, les exercices mal calibrés et trop complexes pour un début. J’ai même commencé à tirer la tronche, j’étais dans un mauvais état d’esprit.
Pourtant JD (le prof chez Meteor) nous avait bien dit que c’était pas bien grave de rater puisque c’était pour évaluer nos compétences. Mais je ne sais pas, ça m’énervait de ne pas réussir. J’ai réalisé que j’avais pas le niveau en Javascript et ça m’a plombé. Je voulais abandonner la formation à ce moment là.
Et c’est le prof qui t’a remobilisé ?
Mon ami me boostait et JD me rassurait. Il est très à l’écoute avec tout le monde. Mais je crois que personne n’avait entendu quand il disait que c’était un bilan de compétences et qu’il était même normal de ne pas tout réussir. Mais moi, j’arrivais pas à l’entendre. Je pense que j’ai été vexé de rater. Ça peut paraître prétentieux mais je suis pas habituée à rater. J’ai jamais vraiment échoué. Je me suis donnée tous les moyens pour réussir dans mes études et dans la vie pro. C’était la première fois où je voyais mes limites.
Mais en fait, j’étais trop focalisée sur Javascript et j’oubliais qu’en PHP, je me débrouillais mieux. Fallait que je prenne du recul et que je me dise que c’était pas grave de ne pas tout savoir, tant que l’on fait ce qu’il faut pour s’améliorer. Le développement web m’a appris beaucoup sur l’humilité. Et c’est quand j’ai réalisé ça que j’ai décidé de continuer la formation. Je ne voulais pas fuir devant la complexité. C’est ça la prétention : c’est fuir devant l’échec. Du coup, je me suis excusée pour mon côté boudeuse que j’avais eu et j’étais à nouveau d’attaque !
Tu t’entends bien avec les autres étudiants ?
Là aussi, au début c’était compliqué. (vous allez me prendre vraiment pour la fille chiante). Mais en fait, j’ai un aspect très solitaire. Et pour coder, c’est encore pire. J’ai un peu de mal avec les exos en groupe car avant de parler avec les autres, j’ai besoin de comprendre par moi-même et de bosser dans mon coin.
Le truc, c’est que l’on a pas la même façon de coder parce que nous n’avons pas les mêmes logiques. Et quand je travaille en groupe, je suis souvent confronté à une autre manière de coder, différente de la mienne. Et j’admets que j’ai du mal à m’adapter au code des autres. Donc forcément, quand on exprime des désaccords, dès le départ, ça aide pas forcément pour mettre la bonne ambiance !
Mais c’est que du boulot. Là on parle méthode. Niveau humain il n’y avait pas de souci. Mais je sais que je peux être un peu maladroite quand j’exprime mon point de vue. Mais le groupe avec lequel je travaillais comprenait parfaitement. Et là, j’ai hâte de refaire un autre exo en groupe pour que je puisse m’améliorer sur l’aspect collaboratif. L’important, c’est de reconnaitre quand on a eu tort. Je me suis remise beaucoup en question au début de la formation.
Et partie entreprise ?
J’ai commencé la partie entreprise avant O’clock. Pareil, au début j’ai galéré et puis là ça va mieux ! Je suis encadrée par un tuteur qui ne me donne pas la solution. Il va juste me guider sans me mâcher le travail. Et j’aime ça parce que O’clock fonctionne de la même manière. Tu sais qu’il y a quelqu’un pour te guider, mais il va pas te donner la solution. C’est à toi de chercher ! Et jusque là, j’ai toujours trouvé des solutions aux problématiques techniques. Et surtout, c’est la première fois que j’ai un mentor qui regarde mon code et qui me dit si c’est bien ou pas. Dans mes précédentes expériences, j’étais toujours toute seule quasiment.
Tu bosses sur quoi ?
Je bosse sur des sites e-commerces. Je développe des listes de produits ou encore plus récemment une alerte SMS pour annoncer des promos etc. C’est que le début.
Et du coup ? Quelle partie tu préfères ? Les cours, ou l’entreprise ?
Ça dépend quand on me pose la question ? Le truc avec les cours, c’est que j’apprends tout le temps des nouvelles choses alors qu’avec l’entreprise, je bosse principalement sur la même techno.
Pour résumer, j’ai hâte de reprendre le travail quand je suis à la fin des cours. Et quand j’approche de la fin de période de travail, je suis pressée de reprendre O’clock 🙂